Œuvres commentées de Fragonard : La servante justifiée

La Servante justifiée

Jean de La Fontaine narre ici l’histoire d’un homme qui, ayant été observé par sa voisine en délicate posture avec sa servante, réitère la scène avec sa femme. Ainsi, lorsque la voisine ira rapporter ce qu’elle a vu à l’épouse trompée, celle-ci ne pourra faire autrement que de se reconnaître dans son commérage et la servante sera donc innocentée.
Encore une fois, c’est le même épisode qui s’impose pour tous les illustrateurs, celui où le maître lutine sa servante, épié par la voisine. Mais Fragonard choisit de reléguer la voyeuse à l’arrière-plan pour mieux mettre en valeur les ébats des amants. Ils sont particulièrement ardents et joyeux si l’on en juge d’après la posture de la donzelle, à califourchon sur son maître renversé. Fragonard prend quelques libertés avec le texte. Chez La Fontaine c’est la servante qui chute la première « et lui d’en tirer aussitôt avantage ».

L’artiste joue habilement des éléments végétaux pour créer une sorte d’écrin abritant le couple tout en ménageant des échappées entre les feuillages qui permettent à la voisine d’observer la scène. On distingue à peine sa petite silhouette sur la droite. Elle se tient appuyée à une rambarde couronnant une galerie rattachée perpendiculairement à une bâtisse, configuration qui évoque certaines villas dessinées par Hubert Robert et Fragonard en Italie.


Marie-Anne Dupuy-Vachey

© Jean-Honoré Fragonard, La Servante justifiée, Paris, Petit-Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris.