Fantin-Latour. À fleur de peau
Resté célèbre dans l’histoire de l’art pour ses somptueuses natures mortes et pour les portraits de figures illustres de son temps (Manet, Baudelaire, Rimbaud, Verlaine...), Henri Fantin-Latour est un artiste complexe, profondément indépendant dans un siècle marqué par les aventures collectives. Il laisse derrière lui l’image d’un peintre marginal, guidé par une conception très élevée de sa mission d’artiste : « en dehors de mon art, je ne peux rien faire, rien dire, écrit-il ainsi en 1861, [...] car l’art demande tous les sacrifices, car l’art est en dehors de la vie... ».
Très attaché dès sa jeunesse à la restitution fidèle de la réalité, Fantin-Latour succombe très tôt à une inspiration plus poétique, nourrie par son amour de la musique. Il tire précisément de ce grand écart les ferments d’un œuvre multiple qui s’articule durant un demi-siècle entre portraits, natures mortes et « œuvres d’imagination », et qui reste à la fois synonyme de classicisme et de modernité. Henri Fantin-Latour se dérobe ainsi à toutes les étiquettes : venu à la peinture sous l’égide réaliste d’un Courbet, il apparaît comme le dernier des romantiques pour les uns, le premier des symbolistes pour les autres. Dans tous les cas, un artiste intense et délicat cachant sous les glacis d’une peinture austère une sensibilité à feur de peau.
© Autoportrait, 1853, Huile sur toile, Lille, palais des Beaux-Arts