Maria Blanchard, Maternité (1922) Association des Amis du Petit Palais, Genève / Studio Monique Bernaz, Genève
Tandis que le corps des femmes s’expose librement sous le soleil, il se réinvente aussi chez soi, sans fard.
Ces odalisques modernes se représentent dans leurs intérieurs, inventant une nouvelle forme de naturalisme. Plus besoin de paraître ni de faire semblant : la maternité peut être fatigante ; les poses des nus excentriques ; le déshabillé une échappatoire aux diktats des regards et des devoirs domestiques.
Dans l’immédiate après-guerre, Mela Muter et Maria Blanchard (ci-contre), en tant qu’artistes étrangères installées à Paris, réagissent aux inégalités de classes de la société française face à une politique qui milite pour une croissance de la natalité. Leurs madones sont des ouvrières ou des domestiques, d’origine espagnole ou africaine, qui s’éloignent de l’image traditionnelle de la maternité heureuse.
Les artistes femmes sont déterminées à révéler le monde tel qu’elles le voient, à commencer par elles-mêmes ; elles sont désormais libres de se représenter d’une autre façon que les hommes. Leur regard se construit à côté du regard masculin et s’en différencie de manière à la fois tranchée et subtile.
Le regard désirant de l’homme est remplacé par un regard complexe qui travaille pour la première fois la manière dont la sexualité de la femme, ses plaisirs, ses inquiétudes et ses contraintes en général, influent sur ces représentations.
L’autoportrait devient le genre de prédilection car il reflète les multiples identités de ces autrices : artistes professionnelles, mères, filles, modèles, ou encore membre d’un couple d’artistes.
Se représenter, et se représenter nues pour la première fois, leur permet de façonner leur propre identité. C’est là que leur regard s’affûte, se mesure au passé, rêve un autre futur.
Rendez-vous au Musée du Luxembourg pour admirer tous ces portraits !