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Vue de salle dans l'expo Gertrude Stein et Pablo Picasso
© © Didier Plowy pour la Rmn – Grand Palais, 2023

Gertrude Stein, source d’inspiration pour l’art minimal

Stein, de transgressions en expériences

L’écriture de Stein rompt avec les codes littéraires au début du XXe siècle. Comment ?

La liste des transgressions est longue : agrammaticalité, usage restreint de la ponctuation, réduction du vocabulaire, neutralisation du temps, répétition (ou "insistance" selon sa propre dénomination), autant de procédés qui lui permettent de "développer l’idée de chaque partie d’une composition comme étant aussi importante que le tout" (Stein, Interview transatlantique (1946), Paris, Transédition, questions Robert Bartlett Haas, trad. et notes Marc Dachy, 1987, p. 10.)

Gertrude Stein expérimente aussi les mots à travers la poésie et au théâtre. Ses romans, ses poèmes, ses pièces et ses portraits démontent les conventions de leur genre. Dans The Making of Americans (La Fabrication des américains), elle cherche par exemple à rendre les choses intéressantes autrement, avec un style dans lequel tout est unifié et nulle partie ne vaut plus qu’une autre. Elle souhaite obtenir "une immédiateté du moment sans rien ajouter de superflu (Stein, Comment l’écrit s’écrit, op. cit. à la note 2, p. 213), selon ses propres dires.

Source d’inspiration pour les artistes minimalistes

L’art minimal possède une grande sensibilité steinienne : il fait lui aussi table rase des éléments constitutifs de la sculpture, de l’écriture ou de la peinture. La critique d’art américaine Barbara Rose dès 1965 fait le lien entre sa poésie et ce groupe d’artistes minimalistes parmi lesquels Joseph Kosuth, Carl Andre, James Lee Byars ou encore Sol LeWitt.

Five Words in Blue Neon, par Joseph Kosuth en 1965

Image d'oeuvre
Joseph Kosuth Self – defined in five colors 1966 Neons 13 x 233 x 3 cm © Primae / David Bordes © ADAGP, Paris 2023

Joseph Kosuth, dont le mode d’expression privilégié est la tautologie, figure parmi les récupérateurs du langage de Stein. En 1965, il répond aux Five words in a line de Stein de façon littérale avec Five Words in Blue Neon. Cinq mots qui exhibent ce qu’ils sont en même temps qu’ils l’énoncent. Dans le circuit fermé de leur performativité, les pièces de Kosuth n’entendent dire rien d’autre que leur vérité vraie.

 

 

Circles, par Sol LeWitt en 1973

Sol LeWitt est l’un des principaux acteurs du minimalisme et de l’art conceptuel. Sa

production se caractérise par un langage minimal que détermine une approche sémiologique des formes à partir de structures modulaires : un vocabulaire élémentaire articulé en motifs géométriques comme le carré et le cercle (Circles, 1973) et en couleurs primaires, noir et blanc. Son travail trouve de forts échos dans l’esthétique de Gertrude Stein.

Image d'oeuvre
Sol LeWitt Circles, 1973 Lithographie, 22.5 x 22.6 cm © The Metropolitan Museum of Art, Dist. RMN-Grand Palais / image of the MMA © Sol LeWitt / ADAGP, Paris 2023

 

 

 

 

 

Quartett 88, par Hanne Darboven en 1988-89

Image d'oeuvre
Hanne Darboven "Quartett 88" 1990 42 x 29,7 cm Deluxe edition (Ed. 7/27): book, and set of 6 offset prints (with photographs mounted) (extrait) © Hanne Darboven Foundation, Hamburg Courtesy Sprüth Magers / Photo: © Felix Krebs © ADAGP, Paris 2023

Hanne Darboven engage à la fin des années 1960 un type d’"écriture sans écriture". Ses propres écrits sont faits de notations ou de signes, de citations ou d’ouvrages recopiés, d’un système de calcul qui lui est propre pour enregistrer les jours, les mois, les années pour former un colossal ensemble de séries labyrinthiques qui remplissent les espaces. C’est de cette matière composite qu’est faite l’œuvre intitulée Quartett 88 qui rend hommage à ces femmes qui se sont mesurées aux hommes dans leur domaine réservé, et ce, à travers quatre figures emblématiques – Marie Curie, Rosa Luxemburg, Gertrude Stein et Virginia Woolf.

 

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